DOMINIQUE VIDAL
Antisionisme = antisémitisme ?
Réponse à Emmanuel Macron
" Destiné à faire taire la critique d’Israël, le chantage à l’antisémitisme ne date évidemment pas d’aujourd’hui. Mais il a pris un tour nouveau en fonction du contexte géopolitique du pays. La radicalisation du pays – direction et, à un moindre degré, population – pourrait en effet accentuer son isolement. D’où l’effort tous azimuts de Benyamin Netanyahou pour desserrer l’étau. La date du 6 février 2017 entrera peut-être dans l’histoire comme celle d’un tournant du conflit israélo-palestinien. Ce soir-là, la Knesset, le Parlement israélien, adoptait, par 60 voix contre 52, une loi dite « de régularisation ». Il aurait mieux valu dire « de confiscation » : elle ouvre en effet la voie à l’annexion de tout ou partie de la Cisjordanie."
« À ce premier dérapage, le nouveau chef de l’État en ajoute malheureusement un second : à la fin de son discours qui souligne fort justement la responsabilité de l’État français et de sa police, il glisse cette petite phrase : « Nous ne céderons rien à l’antisionisme, car il est la forme réinventée de l’antisémitisme. »
Dans une tribune, aussitôt, je dénonce – comme d’autres – une « erreur historique » doublée d’une « faute politique » : – une « erreur historique », car l’antisionisme a été et reste le positionnement de nombreux Juifs, qui ne considèrent pas que leur place soit en Israël. Comment pourrait-on leur coller l’étiquette infamante d’antisémitisme ? Soit dit au passage, les Juifs antisionistes ou non sionistes sont les plus républicains de tous, puisqu’ils donnent une priorité absolue à leur intégration dans leur communauté nationale ;
– une « faute politique », car le président de la République, de fait, encourage ainsi l’aventurisme de la droite et de l’extrême droite au pouvoir à Tel Aviv. Benyamin Netanyahou, ses amis au Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif) et les sites pro-israéliens ne s’y sont d’ailleurs pas trompés : ils ont vu, à juste titre, dans la petite phrase présidentielle un soutien à la politique d’occupation et de colonisation d’Israël. De surcroît, cette formule conforte la tentative de criminalisation de la campagne Boycott-Désinvestissement-Sanctions (BDS), sans attendre le verdict de la Cour européenne des droits de l’homme saisie par les avocats de militants injustement condamnés. La preuve ? Quelques semaines plus tard, le président du Crif, Francis Kalifat, exige qu’une loi soit votée pour sanctionner l’antisionisme."